Cavale

– Grouille-toi !

Ariel perçut l’exaspération dans l’inflexion impérieuse de la voix de Coralie.

– J’suis crevée.

La voix de Coralie se fit rude :

– Moi aussi. Grouille-toi, j’te dis.
La pente ne semblait jamais vouloir finir. Les deux femmes noires haletaient sous l’effort et leur souffle formait un halo blanc qui les précédait pour s’évanouir aussitôt. Les lumières de Chambéry apparaissaient au loin ; ignorant les élancements dans ses jambes, les jérémiades d’Ariel larguée plusieurs mètres plus bas, le regard fixe et la mâchoire serrée, Coralie marchait, le pas rapide. Quelle heure pouvait-il être ? Elle avait oublié son téléphone portable chez Phil, tant pis, pas question de revenir sur ses pas. Ariel, comme d’habitude, avait oublié de recharger le sien. Elles se retrouvaient en pleine nuit, à longer des routes départementales isolées, à la merci du premier taré, sans espoir de pouvoir appeler à l’aide si un malheur arrivait. Elles marchaient depuis quatre heures au moins. Si elles continuaient sur le même rythme, elles pourraient rejoindre la frontière avant le matin et là, elles seraient sauvées. Coralie connaissait par cœur l’adresse de son cousin Leo, à Turin, il les hébergerait et elles auraient le temps de se retourner. Son seul problème à présent s’appelait Ariel. Ariel était faible. Pour les passes, pas de problème, elle avait du métier, un grand avenir devant elle même si elle le souhaitait, mais elle n’était pas en mesure de faire face aux types qui leur couraient après. Coralie avait conscience qu’elle aurait été plus rapide sans Ariel ; qu’elle aurait eu plus de chance de s’en tirer, mais jamais un instant, la pensée de laisser tomber son amie ne l’avait traversée. Jamais. C’était à la vie à la mort entre elles. A force de partager le même bout de bitume, elles étaient devenues des sœurs. Quand l’une avait mal, l’autre souffrait avec elle. Quand l’une connaissait un moment de bonheur -ils étaient rares-, le souffle de joie les emportait toutes les deux, avec la même intensité. Derrière elle, Coralie pouvait entendre les gémissements refoulés d’Ariel. Agacée, elle s’arrêta et pivota, pointant sur son amie un regard sévère. Mais elle se radoucit quand elle découvrit le visage décomposé d’Ariel. Elle lut les signes avant-coureurs de la défaite, du renoncement. Coralie demeura immobile, observant la silhouette épaisse qui approchait péniblement. A mesure que la jeune femme avançait, Coralie pouvait distinguer les traits de son visage couleur ébène. Les lèvres d’Ariel remuaient. Elle chante ou elle prie, pensa Coralie….

Vous avez envie de prendre en main le destin de Coralie et Ariel ? Leur inventer un futur, un passé ? Allez-y, n’hésitez pas. Ecrivez la suite de ce récit. Les textes les plus inventifs, les plus colorés seront sélectionnés pour tricoter une histoire à plusieurs mains. Envoyez-moi vos propositions par mail ou dans les commentaires. A la manière d’une brodeuse, je découperai et collerai des extraits de textes reçus pour en faire un texte collégial, une sorte de patchwork littéraire ! A vos claviers 😉

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